[C'est arrivé près de chez vous] Trail de Belle Île 2022 - L'Ultra des vagues
Courir, c'est avant tout une histoire de concept.
Courir 42 bornes parce que la distance convient à Son Altesse royale d'Angleterre.
Avancer de 1000m en vertical, “dré dans l'pentu” sur une course de moins de 5km, parce que pourquoi pas.
Courir habillé en banane, avec un oeuf posé sur une cuillère, un ananas sur la tête, en marche arrière, sur les traces de Forrest Gump… Les idées ne manquent pas quand il s'agit de trouver une bonne raison de courir.
Dans la famille des courses à pied qui ont un sens, il y a aussi celles qui épousent un tracé naturel : atour d'un lac, d'une montagne, d'un sentier côtier, d'une île… C'est dans cette dernière catégorie que se trouve la course qui nous intéresse aujourd'hui : l'Ultra des Vagues, épreuve phare de Belle Île en Trail qui nous offre un magnifique tour complet (ou presque) de l'île par les sentiers côtiers (ou presque).
Belle Île, c'est loin ça ?
En distance, depuis la maison, pas vraiment. En temps entre l'inscription et la course… ouais, un peu.
En novembre dernier, Baptiste, un de mes acolytes de Courir à Plusieurs lançait l'idée un peu folle de former des groupes pour tenter notre chance à la loterie. Après tout pourquoi pas ! J'ai toujours entendu dire que cette course était magnifique, mais qu'il était super difficile d'y entrer : tirage au sort oblige, il y a toujours des coureurs laissés sur le carreau. Let's go, on va faire des groupes, à plusieurs on a peut-être nos chances… Et croisons les doigts, au moins un groupe sera retenu.
Quelques semaines plus tard, les mails tombent…
🥁🥁🥁🥁
Action : trois groupes d'une quinzaine de personnes ont été envoyés au tirage au sort.
Réaction : trois groupes d'une quinzaine de personnes prises pour la course.
Eh oui, surprise, tout le monde est retenu. En voilà une chouette nouvelle, une joyeuse bande de 40 potes débarquera sur l'Île avec ses t-shirts arc-en-ciel 🌈
80 bornes, c'est long ça ?
Un peu, mais on commence à avoir l'habitude. Après un 84km en avril, la distance semble conquise, et, ça ne pourra jamais être plus hardcore que Méribel, couru un mois plus tôt.
Les deux courses étaient d'ailleurs assez rapprochées : j'étais rentré de la Savoie avec les cuisses en miettes, et une bonne dose de fatigue. Après les 12h sous la flotte et dans la montagne, j'avais opté pour la règle des “1 jour de repos par heure de course”. Soit 12 jours (pour les lecteurs qui n'ont pas suivi), ce qui nous ramenait quasi fin août, trois semaines avant Belle Île — autant dire, pas de quoi entamer une quelconque prépa.
Quelques footings, un tour complet de ma ville par les frontières du cadastre (ou presque) et restait à croiser les doigts pour que ça soit suffisant. Je m'attends à un parcours relativement roulant : des chemins côtiers, des montées courtes, du plat, pas trop de caillasse si tout va bien. La météo s'annonce en plus de notre côté. Plutôt confiant donc, même si en ultra tout peut arriver.
Le réveil à 4h30, c'est tôt ça non ?
Pour aller courir, pas tant 😅
En ultra, on va courir pendant une journée, ou plus, donc l'heure de réveil est toujours matinale. Ça se comprend, si on veut tenir une barrière horaire de 14h et quelques, ça veut dire qu'il faut bloquer les routes pendant ce temps là, avoir des bénévoles, un speaker, et entamer le démontage juste à la fin parce que demain, il y a le marché là où se tient aujourd'hui l'arche d'arrivée.
La montre sonne à 04h30. Le départ est à 6. Je préfère toujours avoir de la marge le matin — je rogne volontiers sur 15 à 20 minutes de sommeil si c'est pour avoir le temps de prendre le temps, et de me réveiller et déjeuner sans stress. J'avale une tasse de café en poudre (beurk), des pancakes préparés la veille (miam), une banane qui s'était écrasée dans le sac (bof) et une ou deux comptes (top). Sac prêt, chaussures lacées, go !
500 coureurs au départ, c'est beaucoup ça non ?
Erreur numéro 1 : se laisser happer vers le fond du peloton au départ. C'est définitif, je ne sais pas me placer dans le peloton de départ. À l'arrivée, je suis toujours au milieu du peloton, mais je ne sais pas comment je me débrouille, je pars toujours dans les derniers. Alors oui, sur le papier, ça fait bien cette remontada, mais dans les faits, je passe pas mal de moment à piétiner, surtout quand une majeure partie de la course se fait sur des singles.
Note à moi-même : Colin, part en 250e quand il y a 500 personnes, pas 450e.
À la lecture de la course, la barrière horaire semble large : 2h30 pour arriver à Locmaria, après 16 kilomètres, à l'aise. En pratique, ça bouchonne à mort dans un paquet de chemins, on attend, on piétine, j'en ai dans les jambes mais je dois marcher à petit pas, suivant le rythme dicté par ceux de devant.
Erreur numéro 2 : météo mal gérée sur le départ. Je pars en t-shirt, ayant presque oublié qu'on est fin septembre et au bord de la mer. Les seules manches longues que j'ai sous la main, c'est un kway, que j'enfile sur une plage. J'ai chaud, bien, mais avec le soleil qui se lève je finis par être… trempé.
Note à moi-même : Colin, achète des manchons bordel.
C'est beau Belle Île, non ?
Franchement, cette île porte bien son nom. Bordel, c'est beau Belle Île.
Après avoir changé de tshirt à Locmaria (bonne idée d'en avoir un sec dans son sac), me voilà reparti le long de la magnifique côte bretonne. Le soleil s'est levé, et la mer est bleu turquoise. On s'en met plein les mirettes, et la météo est des plus clémentes.
Après une vingtaine de bornes, la masse de coureurs s'est un peu étalée, on se marche un peu moins dessus. Je continue mon bonhomme de chemin tranquillement sur les sentiers côtiers, presque la fleur au fusil — après Méribel, le tour de l'île semble presque une balade de santé.
Malgré tout, la cheville est un peu sensible, et je sens que ça tire depuis le début de la course. J'ai mis une chevillère légère, mais ça ne change rien, j'ai même l'impression qu'elle me gêne plus qu'autre chose. Et de l'autre côté (aka sur l'autre pied), une ampoule s'est formée, puis s'éclate, malgré les kilos de Nok mis avant de partir. Pris d'un élan de “y'en a marre”, je retire ma chevillère, panse mon doigt de pied à vif, et repart comme ça. Advienne que pourra.
On continue avec une petite (longue ?) partie de route jusqu'au ravito de Bangor, où je ne m'éternise pas : on remplit les gourdes, on mange des bouts de banane, on prend des compotes à boire, et c'est reparti. Un paquet de coureurs prennent le temps de s’asseoir, mais de mon côté, je préfère ne pas m'arrêter, de peur de ne pas avoir envie de repartir.
La température a encore monté, le combo short tshirt est juste à propos. L'eau dans les flasques descend vite, et même si la mer est à côté et que le corps a besoin de sel, je me suis dit que j'allais éviter. À plusieurs moments, j'ai manqué de flotte — n'aurait pas été contre un ou deux ravitos supplémentaires : heureusement que ravitos d'eau “sauvages” mis en place par les habitants de l'île sont venus à la rescousse.
La côte est belle, on continue d'avancer, coûte que coûte. Un petit trot tranquille, on avance jusqu'au prochain ravito.
Les copains, ils sont loin non ?
Au dernier ravito, la phrase qui change tout “Oh t'as l'air en forme ! Les copains sont pas loin, ils viennent de partir il y a 5 minutes, ils avaient moins bonne mine que toi !”
Et paf, ça a fait des Chocapic : nouvel objectif, rattrapez les copains. J'en ai encore sous la casquette, j'accélère un tout petit peu. 30 minutes se passent, et j'aperçois un t-shirt arc-en-ciel au loin. Go, on les rejoint. Quel plaisir de pouvoir rediscuter après 10h de course passées en solo 🎉
On papote, j'en ai toujours dans les jambes, et me voilà après quelques kilomètres un peu devant… à nouveau tout seul.
Jusqu'au dernier ravito sauvage, à 3 km de l'arrivée, où je retrouve le grand chef indien de Courir à Plusieurs. Nous voilà partis pour faire les derniers kilomètres ensemble, histoire de franchir la ligne main dans la main.
Dernière descente vers la ville, on pousse un petit 4'30 (mais pourquoi ??) et nous voilà finishers de l'Ultra des Vagues.
Et t'as retenu quelque chose, non ?
Quelle course les amis, quelle course.
Même si on est loin de la brutalité des courses de montagne, le paysage côtier breton n'en reste pas moins beau.
On regretterait le nombre un peu trop grand de coureurs — peut-être partir par sas aurait permis de libérer un peu les sentiers. Un ou deux ravitos en eau n'auraient pas non plus été de trop.
En clair, une course à faire, vraiment. Le paysage et les chemins sont réellement superbes.
À retenir pour les prochaines courses :
- Acheter des manchons : franchement j'avais trop froid en t-shirt, trop chaud en kway, on ne m'y reprendra plus
- La gestion de course, ça le fait : pas eu de (gros) coup de pompes, ni de réelle envie de tout envoyer valser
- Au départ, il faut se placer en milieu de peloton quand on veut finir en milieu de peloton. Je suis sûr que les premiers se placent devant.
- Je ne sais toujours pas bien manger : je n'ai pas avalé grand-chose pendant ces 11 h 45, ça pourra me jouer des tours.
- Je me charge définitivement trop : les trois-quarts de la bouffe que j'amène ne me sert à rien (mais du coup, c'est un peu lié au point 4).
- Prendre une chambre d'hôtel seul, ça ne sert à rien : je ne dors pas mieux qu'en auberge de jeunesse.
Je garde ces points au chaud, ça m'aidera sur la prochaine.
D'ailleurs, c'est quand la prochaine ?
Et en images…
Comme d'hab, la course se retrouve sur mon Strava :
Envie d'en voir plus ? Pour quelques images “de l'intérieur”, c'est par ici :